Exclusif : COVID-19 et fertilité masculine, 7 experts donnent leur point de vue

par Dr. Sam Ward et al - MediQuality

"Nous souscrivons sans réserve à l'importance de la recherche qui a été rapportée. Mais nous souhaitons mettre ce rapport en perspective avec les données scientifiques déjà connues, car nous n'avons pas trouvé cette réflexion et ce cadrage critiques dans les canaux d'information publics", disent les sept experts belges.

Depuis que l'on a élucidé le mécanisme d'entrée du virus dans la cellule hôte par deux protéines (ACE2 et TMPRSS2), l'impact du COVID-19 sur la procréation masculine a bien sûr suscité un énorme intérêt (Hoffmann M, et al. Cellule. 2020 Apr 16;181(2):271-280.e8). L'expression de ces protéines intervient dans de nombreux systèmes organiques différents, parmi lesquels le testicule, où l'expression de l'ECA2 a été observée dans les cellules de Sertoli, une population cellulaire qui soutient la spermatogenèse, les spermatogonies et les cellules de Leydig, responsables de la production de testostérone (Wang et al. Les cellules. 2020 Apr 9;9(4):920).

Le SRAS-CoV-2 étant susceptible d'infecter les cellules du testicule, on peut légitimement s'inquiéter de la transmission virale par d'autres voies (transmission sexuelle) et des conséquences à long terme sur la reproduction chez les hommes. Cependant, dans de nombreuses études, aucune particule virale n'a été trouvée dans les testicules de la majorité des patients infectés ou en convalescence (Achua et al. World J Mens Health. 2020;38:e56,Yang et al. Eur Urol Focus. 2020 Sep 15;6(5):1124-1129, Pan et al. 2019. Fertil Steril. 2020). Bien qu'il ne soit pas certain que le SRAS-CoV-2 puisse être transmis dans le sperme, la pénétration du SRAS-CoV-2 dans les structures de l'appareil reproducteur masculin peut également avoir des conséquences pour la spermatogenèse et la fonction de procréation masculine.

Le message cité ne concerne qu'un rapport de conclusions provisoires et non un rapport d'étude examiné par des pairs, ce qui compromet l'évaluation de la qualité. De plus, cela concerne un très petit groupe de patients (26 patients). Il est remarquable de constater l'absence de groupe témoin ou de données antérieures à l'infection au COVID, et l'inclusion de patients âgés de 35 à 70 ans, qui ne recoupe que partiellement la population jeune que nous retrouvons normalement pour une analyse du sperme.

Effet direct ou indirect ?

Le fait qu'une infection COVID cliniquement claire ait un impact sur la qualité du sperme était déjà connu grâce à des études comparables, dans lesquelles il semblait également que la gravité du tableau clinique était relaté à la gravité de l'anomalie de la qualité du sperme (Holtmann et al.  Stérilisateur d'engrais. 2020 Aug;114(2):233-238. et Li et al. EClinicalMedicine. 2020 Oct 23:100604). Ceci pourrait indiquer une image inflammatoire généralisée, comme on le voit dans d'autres formes d'orchite virale, et dont des signes sont effectivement visibles dans les testicules des patients décédés du COVID (Yang et al. Eur Urol Focus. 2020 Sep 15;6(5):1124-1129, Li et al. EClinicalMedicine. 2020 Oct 23:100604, Achua et al. World J Mens Health. 2020;38:e56.). Il n'est donc pas du tout évident d'affirmer que - et si - les effets du COVID sur la fertilité sont plus importants que, par exemple, ceux d'une grippe sérieuse accompagnée de fièvre.

Compte tenu des données actuelles, toute forme de conclusion est prématurée et la vigilance s'impose. Il est utile de partager les informations et d'alimenter le débat, et tout autant de mentionner les limites des données : par exemple, dans les médias publics, il n'est pas mentionné qu'une infection légère ne semble pas avoir d'impact sur la qualité du sperme (Holtmann et al.  Stérilisateur d'engrais. 2020 Aug;114(2):233-238.), ou qu'une telle image n'est pas anormale, et est dans de nombreux cas réversible, en cas d'infection virale clinique d'autres virus bien connus.

Il est nécessaire de procéder à des tests de population à grande échelle en ce qui concerne le SARS-CoV-2 et les analyses du sperme, tant chez des hommes symptomatiques avec un large éventail de gravité du COVID-19 que chez des hommes asymptomatiques, avant de pouvoir mieux comprendre si une transmission sexuelle peut se produire et d'énoncer clairement les effets du SARS-CoV-2 sur les paramètres du sperme. Un suivi longitudinal des patients avant, pendant et après l'infection clinique au coronavirus, aiderait à analyser la réversibilité des résultats.

 

À propos des experts

Dr Sam Ward, urologue, Centre de fertilité de la Clinique Saint-Jean, Bruxelles

Prof. Dr Maarten Albersen, urologue, UZ Leuven

Prof. Dr Dr Guy T'sjoen, endocrinologue, UZ Gent

Prof. Dr Dirk Vanderschueren, endocrinologue, UZ Leuven

Prof. Dr Frank Claessens, responsable de recherche au Laboratoire d'endocrinologie moléculaire, KULeuven

Prof. Dr Leen Antonio, endocrinologue, UZ Leuven

Prof. Dr Luc Meeuwis, , Centre de fertilité de la Clinique Saint-Jean, Bruxelles

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